Dès la première lecture de la pièce, le personnage d’Agnès m’est très vite apparu comme étant le plus difficile à saisir. Difficile car tout en nuances mais surtout très secret. Ses seules caractéristiques apparentes sont ses qualités de couturière et son amour sans limite pour sa sœur Rose. Agnès intériorise tous ses combats personnels. Elle est dans une tension perpétuelle entre un présent qui l’étouffe et un idéal d’émancipation auquel elle s’accroche de toutes ses forces. Et bien qu’elle conserve une âme d’enfant joyeuse, celle-ci est constament bridée par des responsabilités bien trop pesantes. Agnès ne se confie à personne, mais fonctionne comme une bombe à retardement, inévitablement vouée à exploser.
Jouer Agnès c’est donc tenter de répondre à un paradoxe intéressant : il s’agit d’assurer une présence lourde de sens, sans toutefois laisser échapper trop de mots. Exister sans trop parler. Savoir censurer ses émotions, ses gestes, sa parole, au bon moment, de la bonne manière. Pour une comédienne, c’est un travail d’introspection très enrichissant. Jouer Agnès c’est jouer certes en silence mais toujours en profondeur.